Une mission d’enquête peut mettre le Qatar hors jeu (11/01/2016)

Mondial 2022. L’Organisation internationale du travail (OIT) va envoyer des experts pour vérifier les conditions de travail sur les chantiers de la Coupe du monde de football. Doha doute de son impartialité.



En novembre dernier, le conseil d’administration de l’Organisation internationale du travail (OIT) a approuvé, à une forte majorité (35 voix pour, 13 contre, 7 abstentions), l’envoi d’une mission d’enquête sur le travail forcé au Qatar. En ligne de mire: le chantier de la Coupe du monde de football de 2022. Plusieurs rapports ont dénoncé, au cours des dernières années, l’exploitation des ouvriers étrangers soumis au système de la kafala (lire l’encadré ci-contre) et victimes d’accidents parfois mortels.
Doha affirme avoir introduit des règles contraignantes pour les employeurs et plus protectrices pour les ouvriers. L’émirat serait même le tout premier pays de la région du Golfe à avoir inscrit dans une loi l’abandon du système ancestral de la kafala. Des arguments qui ne convainquent pas l’Australienne Sharan Burrow, secrétaire générale de la Confédération syndicale internationale (CSI). Pour elle, tous ces engagements restent à l’état de promesses. En décembre dernier, elle affirmait que le Qatar n’avait toujours pas renoncé à son «système d’esclavage moderne». L’activisme de la syndicaliste et de son organisation a pesé lourdement dans la décision prise par l’OIT de créer une mission d’enquête sur les abus commis au Qatar.

 

Mille deux cents ouvriers morts
Doha redoute l’influence de cette femme au tempérament bien trempé, qui s’appuie sur le savoir-faire de communicants, de leurs relais à Sydney, Bruxelles et Londres et du puissant réseau syndical international pour lancer ses attaques. Le bras de fer entre la CSI et le Qatar dure depuis plusieurs mois. Et la tension n’est pas près de retomber. Aujourd’hui, Doha accuse l’organisation syndicale de noircir le tableau à des fins qui n’ont rien à voir avec la défense des ouvriers employés sur le chantier de la Coupe du monde de football.
Avant Noël, Sharan Burrow a jeté un nouveau pavé dans la mare en affirmant, dans un rapport, qu’environ 7000 travailleurs employés à la construction des stades trouveraient la mort d’ici à 2022. Quelque 1200 ouvriers ont déjà perdu la vie depuis 2010, accuse la CSI. Doha conteste tous ces chiffres. «Aucun ouvrier n’est mort sur des sites de construction et il n’y a aucune raison de penser que des milliers de travailleurs périront d’ici au coup d’envoi du Mondial dans sept ans», répond l’émirat. Ses représentants voient derrière toutes ces accusations une gigantesque manipulation visant à priver le pays de l’organisation de la Coupe du monde de football.
Présenté en mars prochain, le rapport de la mission d’enquête de l’OIT sur le travail forcé au Qatar pourrait déboucher sur la création d’une commission d’enquête officielle. Une décision qui, si elle venait à être prise, pourrait avoir des conséquences désastreuses pour le Qatar. Depuis le scandale de la FIFA et les accusations de corruption, l’émirat redoute de se voir retirer l’organisation de la Coupe du monde de football en 2022.

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